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Parlons Politique !
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Emmanuel Macron est-il vraiment le Président des riches ?

Emmanuel Macron est-il vraiment le Président des riches ?

 

Dans un sondage Odoxa-Dentsu Consulting paru au début du mois de mai, près de trois quarts des Français (72%) perçoivent Emmanuel Macron comme le « Président des riches ».  Ce point de vue s’accentue chez les personnes qui se déclarent de gauche ( 84% chez les sympathisants du PS, 89% pour ceux de la France Insoumise) et chez les électeurs du Front National (85%).  De nombreuses décisions politiques au cours de la première année du mendat d’Emmanuel Macron ont pu renforcer cette position en creusant les inégalités, du moins à long terme, en avantageant les plus aisés avec une politique fiscale avantageuse sur la fortune mobilière et sur les capitaux tout en même temps pénalisant les plus modestes en coupant dans certaines dépenses publiques et aides.

 

« Il y a une lutte des classes, évidemment, mais c’est ma classe, la classe des riches qui mène la lutte. Et nous sommes en train de la gagner » déclara Warren Buffett à une entrevue à la CNN en 2005, actuellement troisième fortune mondiale  

Warren Buffet

selon le classement annuel de Forbes. Cette citation, en opposition frontale au point de vue de l’actuel Président au sujet de la « lutte des classes » -  qui lui préfère parler d’ « histoires individuelles dans un monde ouvert », montre qu’encore aujourd’hui, au début du XXIème siècle, les luttes ou non contre les inégalités économiques prennent encore une grande part prépondérante dans les choix de politiques économiques.

 

Les politiques fiscales jouent un rôle important dans la redistribution des richesses. La suppression de l’impôt sur la fortune pour tous les revenus du capital, justifiée par un encouragement à l’investissement, ou bien le remplacement des prélèvements existants sur l’épargne par un prélèvement forfaitaire unique (PFU) de l’ordre de 30%, permet à une certaine catégorie de la population d’économiser. Des économies qui pourront être dépensées soit dans le cadre de la consommation ou d’investissements. Néanmoins, on remarque que cette pratique cible une certaine catégorie de la population, détentrice de capitaux en grande quantités. 

 

Pour vérifier, il est important de voir quelles étaient les propositions du candidat Emmanuel Macron, toujours disponibles sur le site d’En Marche.

 

Dans le volet accordé au pouvoir d’achat, le parti du Président de la République souligne un appui pour trois catégories dans la population : les classes moyennes et populaires, les actifs et les plus modestes.

Pour les classes moyennes et populaires,  il s’agit de supprimer la taxe d’habitation ( et ce, pour quatre Français sur cinq), de prendre intégralement en charge d’ici la fin du quinquennat les lunettes, les prothèses dentaires et auditives et de ne pas faire payer des cotisations sociales sur les heures supplémentaires.

Pour soutenir le pouvoir d’achat des actifs,  il s’agira d’une augmentation du revenu net de chacun avec la réduction des cotisations sociales : par exemple, un individu ayant 2 200 euros de revenus net par mois pourrait obtenir 500 euros de pouvoir d’achat supplémentaire par an. Cela pourrait se financer grâce à la hausse de la Contribution Sociale Généralisée (CSG), pour laquelle les retraités précaires et les chômeurs serait exemptés. Toute reprise d’emploi serait encouragée par la prime d’activité, pouvant bénéficier à 2,4 millions de personnes. Pour indication, une personne au SMIC pourrait avoir grâce à cette prime 80 euros de plus par  mois en pouvoir d’achat. Toujours avec l’exemple d’un salaire au SMIC, les deux mesures permettraient une hausse de 100 euros de plus par mois.

Les plus modestes seraient soutenus notamment grâce à une hause de plus de cent euros de l’allocation adulte handicapée et du minimum vieillesse, allant des alentours de 800 euros pour dépasser les 900 euros pour une personne seule. Egalement un versement social unique et automatique permettrait de simplifier la vie de près de 12 millions d’individus, en luttant ainsi contre le non-recours aux aides sociales.

 

Néanmoins, quelles ont été dans les faits, les premières mesures économiques phares du gouvernement ?

Gouvernement Philippe II.

Quand on repense aux mesures prises par le gouvernement, on pense à trois d’entre-elles, qui ont fait grincer des dents plus qu’un :  la suppression de l’impôt sur la fortune, remplacé par une taxe sur le patrimoine immobilier et le prélèvement forfaitaire unique de 30% des revenus du capital, la baisse des aides au logement de cinq euros et la réduction des emplois aidés.

 

 

Selon une enquête de l’OFCE, ces mesures ont dans un premier temps une conséquence pour les inégalités : les 2% les plus aisés de la population tirent le plus de bénéfices, essentiellement grâce à la baisse de l’imposition du capital mobilier et les ménages les plus modestes perdront en pouvoir d’achat suite à la hausse de la fiscalité indirecte (notamment avec les hausses de taxes sur le carburant et sur le tabac) pas  suffisamment compensée par la revalorisation en fin d’année des minimas sociaux.

 

Mathieu Plane, économiste à l'OFCE et ancien conseiller d’Arnaud Montebourg, tire comme analyse que si l’on prend en compte les deux premières années du quinquennat, 6 millions d’euros seront redistribués aux ménages, évitant ainsi de faire une politique économique au détriment des ménages modestes. Néanmoins, son constat montre que fin 2019, les 5% les plus modestes auront une hausse du niveau de vie de 0,2% et les 5% les plus aisés de 2,2%. Ces derniers capteraient 42% des gains de niveau de vie. Les « riches » sont les plus grands gagnants mais ne sont pas les gagnants de la politique économique.

 

 

En fin de compte, ce sont les ménages aisés sans patrimoine qui ont la plus grande perte de pouvoir d’achat entre 2017 et 2018. En gardant la taxe d’habitation tout en ne pouvant pas bénéficier des mesures sociales et des allègements sur la fiscalité du capital, ils perdent 0,4 point de niveau de vie cette année.

Les classes moyennes sont ni perdantes, ni gagnantes : l’abattement de 30% de la taxe d’habitation et l’élargissement du crédit d’impôt pour les emplois à domiciles compensent les hausses de la fiscalité écologique et sur le tabac, ainsi que de la CSG pour les retraités.

 

Quel est donc l’impact sur le pouvoir d’achat des Français ?

 

Au premier trimestre 2018, le pouvoir d’achat des Français était dans l’ensemble en baisse suite au transferts de cotisations sociales et de la CSG et de la hausse sur la fiscalité écologique et indirecte (tabac).

Au second et au troisième trimestre, une hausse du pouvoir d’achat des Français est néanmoins prévue, notamment avec la baisse de la fiscalité directe. La réforme de l’impôt sur la fortune et l’élargissement du crédit d’impôt relatif aux emplois à domicile doivent y contribuer.

 

On note, cependant, que les ménages se situant en haut et en bas de la distribution des niveaux de vie se retrouvent le plus impactés. Les salariés verront leur pouvoir d’achat grimper au détriment des retraités et des détenteurs de capitaux.

A court terme, les grands gagnants restent les 5% les plus riches, notamment grâce à la baisse de la fiscalité sur le capital mobilier. Néanmoins, une majorité s’en sort sans grand impact sur son niveau de vie (+/- 0,2%) : on y retrouve les ménages dont le niveau de vie est supérieur au 5% les plus modestes et inférieur au 25% les plus aisés.

Les perdants sont les ménages situés entre le 15ème et le 19ème vingtile dans la distribution des niveaux de vie et les 5% les plus modestes. Ces derniers sont victimes de la hausse de la fiscalité indirecte et la baisse des APL pas compensées totalement par la revalorisation des prestations sociales en fin d’année. Pour les premiers, il s’agit d’un non-bénéfice par rapport à l’impact amoindri de la taxe d’habitation et l’impact non conséquent des mesures de pouvoirs d’achat compensant l’augmentation de la fiscalité indirecte et de la CSG.

 

En prenant en compte l’ensemble de ces points, on note que dans l’opinion publique, le revenu est une variable plus importante que la profession, l’âge ou le diplôme sur l’action du Président. Deux tiers des personnes ayant un revenu inférieur à 1200 euros par mois qu’il manque de solidarité envers les plus démunis, 43% pour ceux ayant un revenu entre 1200 et 2000 euros par mois. Au contraire, deux tiers des personnes ayant un revenu supérieur à 3000 euros par mois sont d’avis que l’on « évolue vers trop d’assistanat ». La question du renforcement du contrôle des chômeurs est representative de cette bipolarisation dans l’opinion publique : 53% des personnes ayant un revenu en dessous de 1200 euros par mois le voient mal, alors que 70% de ceux qui gagnent entre 1200 et 2000 euros par mois le voient positivement (75% au delà de 3000 euros).